Etanchéité.Info - Numéro 83 - Septembre 2024

TÉMOIN 48 PHILIPPE GRUAT ÉTANCHÉITÉ.INFO #83 SEPTEMBRE 2024 Crise du neuf, rénovation énergétique, enjeux environnementaux, réglementaires et économiques : Philippe Gruat, président de l’Association des industries de produits de construction (AIMCC), dresse pour Étanchéité.Info un panorama du secteur. LE CONTEXTE Philippe Gruat préside l’AIMCC depuis 2021. Il est également président non-exécutif et administrateur de plusieurs sociétés du secteur des produits de construction. Il a fait toute sa carrière au sein de groupes tels qu’Air Liquide, Lafarge et SaintGobain dans des fonctions marketing et de direction générale. Il préside également Agyre, une start-up de l’économie circulaire et Builders, école d’ingénieurs de la construction. Il est ingénieur ESTP, diplômé de l’ESSEC et titulaire d’un certificat d’administrateur de Sciences Po. « Les fabricants attendent des pouvoirs publics de la construction investissent énormément depuis plusieurs années, non seulement pour fabriquer des produits plus sobres en en modifiant les composants ou en ayant recours à des matériaux biosourcés par exemple mais également en améliorant leur outil de production avec le remplacement des énergies fossiles par l’électricité notamment. Cela représente des milliards d’euros. Mais les fabricants ne peuvent agir seuls et nous attendons des pouvoirs publics des mesures de soutien avec, entre autres, un prix de l’électricité raisonnable et stable, des infrastructures de transport et de stockage de CO2 ou encore la possibilité pour les usines de s’installer au plus près de ses points de captage. Autre axe de développement : la préfabrication qui transfère une partie de la mise en œuvre du chantier à l’usine. Les gains sont importants en matière de temps de pose, de réduction des déchets et de nuisance. Encore peu visible à ce jour, elle demande une collaboration entre industriels qui n’est pas toujours évidente à instaurer alors même qu’ils partagent les mêmes intérêts. Il faut dire que l’innovation a encore des difficultés à convaincre. Même si elle est riche pour l’ensemble des matériaux de construction, les lancements sur le marché sont souvent très longs et complexes. E.I. C’est-à-dire ? P. G. Certes, il existe les procédures d’Atex mais de manière générale, la réglementation est aujourd’hui difficile à comprendre, voire contradictoire. Une simplification est nécessaire, ne serait-ce que pour retrouver un certain bon sens tout en répondant aux besoins de la transition écologique : ce que l’on cherche c’est un bâtiment performant sans avoir à se perdre entre ce qui relève de textes réglementaires nationaux, européens… Car le résultat, c’est que la mise en œuvre d’une innovation peut modifier les conditions d’assurabilité de l’entreprise. De plus, elle peut également demander de changer les modes de pose et ces nouvelles méthodes peuvent être mal appréhendées. Un exemple très simple : prenez une plaque de plâtre prépeinte. Si l’électricien vient noter ses calculs et emplacements de prises dessus, tout est à reprendre et le bénéfice est perdu alors même que le produit, un peu plus cher à l’achat, faisait économiser une couche de Entretien avec Philippe Gruat, président de l’AIMCC PROPOS RECUEILLIS PAR ADELINE DIONISI ÉTANCHÉITÉ.INFO Dans la filière construction, que représente l’AIMCC ? PHILIPPE GRUAT À travers les organisations professionnelles, nous représentons tous les secteurs des produits, matériaux et équipements de la construction et des travaux publics : de l’enrobé mis en œuvre lors de travaux routiers aux fenêtres, en passant par le ciment, le béton, les plastiques, les métaux ou encore les produits finis comme les isolants, les plaques de plâtre et les membranes d’étanchéité. Au sein de la filière construction, il s’agit donc d’une composante majeure dont les chiffres parlent d’euxmêmes : 60 milliards d’euros de chiffre d’affaires, 7 000 entreprises et plus de 450 000 emplois. E.I. Quel rôle jouent les industriels de la construction face aux enjeux auxquels la filière est confrontée ? P. G. Ils sont positionnés au début de la chaîne et subissent par conséquent ses difficultés comme la crise du neuf et la hausse des prix de l’énergie. Mais ils apportent également leurs solutions grâce au développement de produits plus performants. Néanmoins, leur prix parfois plus élevé ne permet pas toujours leur généralisation. Cela concerne également la rénovation énergétique. Le marché est plus dynamique mais il est long à se massifier par manque de stabilité des incitations financières. Ces défis économiques sont par conséquent structurels et donc d’autant plus complexes à appréhender. E.I. Que sous-entend la performance des produits que vous évoquez ? P. G. Elle recouvre plusieurs angles. Le premier est évidemment leur décarbonation. Les industriels de

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