Etanchéité.Info - Numéro 81 - Mars 2024

TÉMOIN 44 EMMANUEL SULZER ÉTANCHÉITÉ.INFO #81 MARS 2024 les étapes de l’acte de construire : organisation du travail, approche des matériaux, techniques de mise en œuvre, collaboration entre les lots… E.I. Comment ces évolutions sont-elles alors gérées ? E.S. L’entreprise générale étudiée étant une grosse structure, elle disposait de services supports, en l’occurrence les ingénieurs de l’agence locale et les ressources humaines, s’assurant de la présence des moyens matériels et humains nécessaires. Sur le terrain, la mise en musique de l’ensemble est du ressort du conducteur de travaux et du chef de chantier qui gèrent, à eux deux, l’organisation et le phasage du chantier. Car les exigences environnementales ne viennent pas remplacer les contraintes de délai et de coûts, elles s’y ajoutent. Ainsi, le recours au mode constructif mixant bois et béton modifie les méthodes de travail des intervenants. Le bois notamment nécessite une attention particulière vis-à-vis de l’humidité et la préfabrication hors site une organisation millimétrée des livraisons et du stockage. Ces rôles incombent plutôt au conducteur de travaux. Le chef de chantier, quant à lui, prend en charge le pilotage de la mise en œuvre et la supervision des ouvriers. E.I. L’association de deux matériaux en structure nécessite-t-elle un savoir-faire spécifique ? E.S. Nous avons observé deux phases de travaux distinctes : la mise en œuvre du béton pour les fondations, les cages d’escalier et d’ascenseur puis du bois pour la superstructure. Il y a donc eu deux équipes d’encadrement différentes, chacune spécialisée dans son corps de métier. Il n’y a pas eu, en revanche, de transferts de compétences entre encadrants, c’est-à-dire que les professionnels du gros œuvre n’ont pas été formés aux savoir-faire du bois et vice-versa. Le manque de temps en serait la raison première. Finalement, il s’agissait plutôt d’un cumul de retours d’expérience au fur et à mesure de l’avancement des travaux. Les savoirfaire ont ainsi été touchés du doigt mais restent clairement à capitaliser. E.I. Qu’en est-il des ouvriers ? E.S. La principale difficulté rencontrée a été celle de la jonction entre les lots bois et béton car là non plus, les ouvriers n’ont pas bénéficié de formation à la mise en œuvre du bois. Le chef de chantier charpentier leur montrait rapidement les outils à utiliser, les gestes à effectuer… Mais là encore, il n’y a pas de pérennité des enseignements reçus. E.I. Une montée en compétences de l’ensemble des acteurs semble nécessaire pour accompagner la transition environnementale dans le bâtiment… E.S. La formation sur chantier a ici montré ses limites et ne permet pas de réelle montée en compétences alors même que les systèmes constructifs changent. La coordination entre les corps d’état, qu’il s’agisse de technique ou d’organisation, renforce encore un peu plus le rôle des personnels encadrants. Comme le soulignait Caroline Datchary dans son ouvrage La dispersion du travail (Octarès, 2011) « la planification centralisée ne suffit plus, elle doit être étayée par une prise en compte accrue du terrain et de ses aléas, d’où le rôle de plus en plus décisif des acteurs intermédiaires comme le conducteur de travaux ». Sans oublier non plus les autres catégories de personnels. l « La formation sur chantier a montré ses limites et ne permet pas de réelle montée en compétences tandis que la coordination entre les corps d’état renforce encore un peu plus le rôle des personnels encadrants. »

RkJQdWJsaXNoZXIy MTY5NjE1OA==